4-MILITARY - Histoire M201

Par un curieux hasard de l’histoire c’est un Fabricant français bien connu, Hotchkiss qui va continuer à faire vivre la Jeep en France et même à ressusciter le légendaire modèle MB. Tout commence en 1946 lorsque Hotchkiss décroche un contrat d’exclusivité concernant la vente de la CJ-2A puis CJ 3A en France. La commercialisation et la distribution de ces modèles signés Willys-Overland ne furent pas assurées par Hotchkiss mais par la société SOFIA (Société Financière Industrielle Automobile) dont Hotchkiss détenait l’essentiel du capital. C’est cette solution fut d’abord retenue afin de préserver intacte l’image de fabricant d’automobiles de luxes qu’incarnait alors le célèbre constructeur français. C’est à partir de 1953, que Hotchkiss cesse d’être un simple intermédiaire et commence à mettre un pied dans l’aventure en fabricant toutes les pièces détachées du modèle MB nécessaire à l’approvisionnement du marché de l’occasion mais aussi et surtout des stocks de l’armée française qui possède un parc de près de 10 000 Willys MB ou Ford GPW. Cette nouvelle activité ne pourra que soutenir les ventes plutôt timorées des CJ 2A et 3A. Les CJ-2A puis 3A paraissent effectivement difficile à diffuser dans un pays où la profusion et le prix attractif des modèles MB saturent le marché. Ainsi, afin de passer la vitesse supérieure, est négociée dans la foulée, en 1954, un autre contrat avec Willys-Overland qui entre temps est devenu Willys Motors au sein du groupe Kaizer Frazer depuis son rachat en avril 1953. Ce contrat porte désormais sur la licence de construction de tous les modèles de la famille Jeep fabriqués par l’américain ainsi que toutes les pièces détachées nécessaires. L’année 1954 voit donc apparaître au sein du catalogue du constructeur français de Saint Denis la première Jeep civile construite en France : la JH-101.

Fabrication Jeep M201 La production de la JH-101 s’effectuera jusqu’en 1960, date à laquelle 3 496 exemplaires sont sortis des chaînes de l’usine de Stains (Seine St-Denis), tombée dans l’escarcelle d’Hotchkiss après son rapprochement avec Brandt en 1954. Le flambeau est immédiatement repris cette même année par un modèle de fabrication entièrement française cette fois ci, complètement identique au précédent intégrant tout de même quelques modifications mineures dont le passage en 12 volts fut sans aucun doute la plus importante. Ce « nouveau » modèle porta dès lors la douce dénomination de JH-102. Seulement 1134 exemplaires seront produits jusqu’en 1966 dont 93 exemplaires en version diesel, la surtaxation du super ne datant malheureusement pas d’aujourd’hui. Essayant de faire décoller les ventes, Hotchkiss cherche à diversifier la gamme et développe donc une version à châssis long de conception purement française. Elle sera produite sous la dénomination HWL à partir de 1963. Sa diffusion restera également relativement discrétionnaire puisque seulement 773 exemplaires furent construits.

Jeep M201 En fait Hotchkiss se heurte à un mur auquel la Jeep elle même n’est pas étrangère. La raison majeure et la plus évidente tient à la forte diffusion, spécialement en France, des Jeeps type MB ou GPW provenant de la guerre. Fait aggravant, il s’avère que ces engins ont la vie dure et semblent même être dotés d’une robustesse quasi éternelle. De plus lorsque l’on se met à la place de l’acheteur, le surcoût engendré par une production française neuve par rapport aux modèles MB ou GPW (même restaurés ou reconstruits par des professionnels) s’avère significatif alors que les performances quant à elles demeurent quasiment inchangées. Enfin, élément bien plus subjectif, l’image de la Jeep originale a fait mouche dans l’inconscient collectif aussi bien par sa bouille bien plus élégante que ses benjamines au capot rehaussé, que par la nostalgie grandissante qu’elle ne cesse de ravivée, symbolisant sans aucun doute les moments les plus heureux et joyeux de ces 20 dernières années. Bref, il était très à la mode en ce temps là de rouler en MB ou GPW. C’est finalement au milieu des années 50 que la firme Hotchkiss engrange véritablement les fruits de son pari sur la Jeep grâce au seul véritable marché porteur à l’époque :celui des militaires. En effet, la société Hotchkiss, qui détenait entre autres depuis 1952 la licence exclusive de fabrication des pièces détachées concernant les Jeeps Willys MB (et donc Ford GPW), était donc devenu un fournisseur attitré de l’armée. Elle eut ensuite l’occasion de doubler ses liens avec cette vénérable institution par le biais de la fusion qu’elle opéra avec Delahaye en 1954 et qui fournissait alors les VLR. Lorsqu’en juillet 1954, Delahaye cesse d’exister, Hotchkiss se retrouve seul face à ce rude client à qui elle finit de livrer les milles exemplaires de VLR afférant au dernier contrat passé en décembre 1953. Tout les éléments sont désormais réunis pour que l’élection de la Jeep à la succession de la Jeep dans les rangs de l’armée française devienne aussi logique qu’incontournable.

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Les hauts responsables à képi, définitivement las du temps perdu et agacés par les nombreux déboires nés de l’expérience Delahaye, avaient définitivement fait une croix sur son avenir. Restait alors en lice la COB, qui, mis à part le rédhibitoire problème de son coût, se faisait fort de corriger l’ensemble des défauts de sa défunte génitrice. Toutefois, la réaction allergique qu’entretenait désormais les militaires à l’égard des solutions nationales ne plaidait a priori pas en sa faveur. Il ne fallut pas plus que l’arrivée d’Hotchkiss autour de la table, et de la Jeep dans ses bagages, pour provoquer sous les képis le déclic qui enterra la COB sans même que son cas ne soit réellement pris en compte. La jeep type MB, répondait en effet le plus simplement du monde aux préoccupations des militaires tant au niveau de ses performances que par l’homogénéité du parc automobile ou encore par le retour à des acquisitions moins dispendieuses qu’elle incarnait. Du fait de ces motivations précises, c’était la Jeep type MB et pas une autre que les militaires français convoitaient. Il faut bien avouer que ces derniers étaient devenus septiques en ce qui concerne les nouveaux produits. De plus, la Jeep Willys MB avait quant à elle au moins le mérite d’être connue du personnel militaire et l’on se mettait ainsi à l’abri de toute mauvaise surprise. L’engin ne datait certes pas d’hier mais une rapide mise à jour de certains organe la rendra encore plus fiable et totalement exploitable. D’ailleurs, quelque soit l’endroit du globe où l’on tournait les yeux, il était difficile de trouver un véhicule à la solidité et aux capacités tout terrain plus intéressantes. Ce qui se faisait de mieux était sans conteste la nouvelle M38 A1 qui n’était toutefois rien d’autre qu’une Willys MB améliorée, dotée de capacités tout terrain certes un peu plus honorables mais dont le coût était devenu prohibitif. Enfin, au gré des évolutions technologiques, rien n’empêchera l’armée d’effectuer une mise à jour de son parc de Jeep, d’autant plus que l’expérience avait clairement prouvée que ce fabuleux engin pouvait se prêter à n’importe quelle modification.

jeep désert Face à cette position qui promettait de généreux débouchés, Hotchkiss, qui possédait déjà la licence de production des Jeeps CJ en France, se tourna alors immédiatement vers son partenaire, Willys Motors afin de négocier les droits de licence concernant la production de la Jeep Willys MB qui n’est plus fabriquée depuis 1945. Forts des solides liens qui unissaient désormais les deux firmes et l’américain voyant dans cette demande française une source supplémentaire de revenu à ne rien faire, de surcroît avec un modèle dont il avait définitivement fait le deuil, l’acceptation du contrat de licence ne fut qu’une formalité. Il fut alors ajouter au précédent contrat de licence portant sur les modèles CJ en 1955. jeep armée Ainsi, si l’on se trouvait bien loin de la solution nationale initialement envisagée, celle-ci avait tout de même le mérite de l’être à moitié. C’est l’usine historique d’Hotchkiss située à Saint-Denis, boulevard Ornano, qui ouvra timidement le bal dès 1955 avec la production de 465 exemplaires de jeeps Hotchkiss, « licence Willys MB ». Dans cette première mouture, la Jeep fabriquée par Hotchkiss est alors strictement identique à son aînée américaine des cales de capot aux feux de black-out en passant par les pneus type military ou encore le voltage de 6 volts. Seules les jantes pleines de fabrication nationale, en lieu et place des jantes de combat démontables venaient trahir ses origines latines. A ce titre, ces 465 exemplaires ne portent pas encore la désignation M201 et ne peuvent être considérés comme tels puisqu’ils ne sont que la stricte copie sous licence du modèle américain. Le type M201, quant à lui, désignera les exemplaires suivants propres à la conception Hotchkiss, correspondant à la fabrication sous licence d’une version modifiée de la MB. Ce premier galop d’essai de production avait alors principalement pour but de valider le processus de fabrication sous licence de la Jeep type MB en France alors même que les spécifications propres au modèle français n’étaient pas encore complètement définies.

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Bien que ces 465 exemplaires seront tous produits durant l’année 1955, leur livraison aux autorités militaires s’effectuera jusqu’au début de 1956. C’est à partir de 1956 qu’est alors initiée la fabrication propre aux M201. Suite à la fusion opérée avec Brandt en 1956, à partir de 1957, toute la production des M201 est transférée en l’usine Brandt de Stains, à quelques kilomètres au nord de Saint Denis. C’est là que seront construites les deux versions de M201, 6 et 24 Volts (le 12 volts étant une transformation propre à l’ERGM), jusqu’à la fin de leur production en 1966. Si durant les premières années de production, les versions 6 volts sont clairement prédominantes, celles-ci cèdent rapidement le pas (progressivement puis complètement) aux versions 24 volts à partir du tout début des années 60. Une grande partie de ses M201 6 volts sera par la suite transformée en 12 et surtout 24 volts par les services de l’ERGM de la Maltournée. Durant ces 12 années de production, Hotchkiss, puis Hotchkiss-Brandt aura donc produit 465 Jeeps licence MB et 27 628 M201.

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Livre-jeep
(Informations tirées du livre « JEEP Sur les traces de la légende » de D. Dalet et C. Le Bitoux chez ETAI).

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